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La côte et la Rance, vues par Albert Mérat, 1903

« Sous le ciel délicat et piqué de voilures
J’ai reconnu votre Rance adorable, et les bois
Venaient bercer dans l’ombre et le baiser à la fois
Ses sables fins et blonds comme des chevelures.

Saint-Servan, Saint-Malo, Dinard, je vous revois,
Je vous aimai : la mer et la lumière ensemble
Faisaient au bord du ciel un ciel qui lui ressemble,
Et j’écoutais le soir et le flots aux cent voix.

Une crique, le goût amer
De l’embrun, un filet qui sèche...
Ce n’est une barque de pêche,
Et c’est déjà toute la mer.

La mer efface les sillages,
Mon regard les quitte à regret :
Épouvanté par son secret,
Je ramasse des coquillages.

J’aime ces beaux élans du flux et du reflux.
On arrive ; le sable au loin, la mer à peine...
L’heure passe, la baie est une coupe pleine ;
La tableau qu’on connaît ne se reconnaît plus.

Le grain de sable et nous dans l’ordre universel,
Sommes le même poids de poussière et de vie ;
Laissons notre poitrine au néant asservie
Boire la bonne odeur de l’iode et du sel. »

Albert Mérat (1840-1909), La Rance et la mer, paysages bretons, Paris, l’Auteur, 1903
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