Emeraude Nature - Tour des Ebihens - Emeraude Nature
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Située au coeur de la baie de Saint-Jacut, entre le Cap Fréhel à l'ouest, zone importante de mouillage, et la Rance à l'est, l´île des Hébihens est un lieu hautement stratégique pour la défense extérieure de Saint-Malo, la cité-corsaire. En effet, la baie de la Fresnaye, parsemée d'innombrables îles et îlots, constitue à marée basse un secteur très favorable pour un débarquement terrestre... Lors de l'attaque de Saint-Malo par les Anglais en novembre 1693, la position était déjà occupée par des retranchements et batteries. L'île des Hébihens reliée à la terre ferme à marée basse (tout comme le fort Cézon à l'Aber Wrac'h) est pour Vauban un lieu propice à une descente ennemie.

Dès le début de mai 1694, l'île est retenue pour l'établissement d'une tour d'observation et d'artillerie, elle servira de "tour-réduit" d'un vaste ensemble de batteries de côte et retranchements visant à créer un asile aux navires de pêche de Saint-Briac, Saint-Jacut et Plévenon... qui drainent de la mer des fortunes.

Si l'île est la propriété des moines de Saint-Jagu qui céderont une partie de leurs terres au Roi pour l'établissement de la tour, la construction de l'ouvrage sous la direction de Garangeau, ingénieur militaire de Saint-Malo est commanditée par monsieur le comte Louis de Pontbriand, marquis de Pleurtuit, baron de la Houle à Saint-Briac et capitaine garde-côte.

Afin de financer la tour des Hébihens, Vauban proposa à Monsieur de Pontbriand, "homme vif et plein d'expédients qui vient assez bien à bout de tout ce qu'il entreprend", le marché suivant inspiré de celui qui avait permis la construction de l'église de Saint-Briac quelques années plutôt : Pontbriand s'engageait à mettre à disposition en avance le revenu de la pêche aux maquereaux de ses quelque 25 bateaux qui travailleraient pour cela les dimanches et jours fériés du mois de mai, saison de la pêche (après que le coucou eut chanté...). Le tout avec la bénédiction du Seigneur (Très Grand), représenté en la personne de l'évêque de Saint-Malo...

Vauban en fin psychologue précise : "Il [Monsieur de Pontbriand] est fort "engoué" de ce bâtiment ; sur ce que je lui ai mis dans l'esprit que l'on appellerait la tour de Pontbriand, que ses armes y seront mises au-dessous de celle du Roi et que cela servirait un jour d'un titre considérable à ses descendants, ce qui l'a fort touché comme les Bretons sont glorieux, mais une autre chose qui le touche bien davantage est qu'il a un fils, capitaine depuis 6 ans au régiment de Villepion, homme de mérite et très bon officier, qu'il a grande envie de faire colonel. Il lui a même voulu acheter un régiment de cavalerie dont je l'ai détourné pour lui dire que les gens de mérite devaient acheter par le service et non autrement et que l'[édification] de sa tour y aiderait plus à faire chemin à son fils que l'argent qu'il voulait employer à cet achat. Il m'a si bien cru que j'ai parole de lui qu'il la commencera aussitôt qu'on lui en aura fait savoir l'agrément du roi". Vauban use de la flatterie pour arriver à ses fins : construire la tour nécessaire à la défense de Saint-Malo et le tout sans aucun frais pour le trésor royal, au plus bas...

Le mode de financement par droits extraordinaires de pêche pendant 15 ans fut conclu par traité avec le marquis de Nointel, intendant de Bretagne en juin 1694. Le roi, représenté par le duc de Chaulnes, gouverneur de Bretagne, concéda l'achat du pain de munition aux ouvriers affectés à la construction de la tour. Si le devis établi par Garangeau le 26 juin 1694 s'élevait à 16 826 livres, Monsieur de Pontbriand fils, Joseph-Yves, (le père meurt en 1698) dut avancer en plus la somme de 6 174 livres en travaux supplémentaires...

Garangeau établit les plans de la tour des Hébihens (coupe et plan de la tour des Hébihens, à Saint-Malo par Garangeau, le 17 août 1695) suivant le projet directeur de Vauban. Le parti de construction est à rapprocher des modèles de tour tronconique à escalier hors oeuvre type Tatihou et la Hougue (mis en oeuvre par l'ingénieur Benjamin de Combes).

La tour fut achevée en juillet 1697 (élévation de la tour des Hébihens, à Saint-Malo par Garangeau, le 16 juillet 1697) après trois campagnes de travaux. Le nom de Pontbriand reste définitivement attaché à la tour des Hébihens. Quatre canons de 4 livres de balle (récupérés par Pontbriand sur une galiote anglaise en juillet 1695 lors de l´attaque de Saint-Malo) installés en batterie haute et une dotation de 25 boulets par pièce, assuraient la défense de la tour. Le magasin à poudre contenait seulement 200 livres de poudre... En 1758, la batterie de la pointe des Hébihens comprenait deux pièces d'artillerie, la première de 18 livres de balle et la seconde de 12 livres de balle tandis que la tour était dotée de deux pièces de 4 livres de balle et deux canons de 3 livres de balle. Trois canonniers de la marine étaient affectés à la défense de l'île...


Ce site exceptionnel, aujourd'hui propriété privée, se laisse découvrir à marée basse.

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